Malice de femme
Présentation d’un travail
Dernière date
3 Juin 2018 - Paris
Photo : « Le miroir est le vray cul du Diable “ Albrecht Durer
Heure : De 10h à 13h. Entrée libre. Inscription par courriel à : cecile.imbert@free.fr
Lieu : 212 Av. du Maine, 75014. Au deuxième étage, local de l’ELP.
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« On pourrait faire une histoire des limites, de ces gestes obscurs nécessairement oubliés des qu’accomplis, par lesquels une culture rejette quelque chose qui sera pour elle l’Extérieur » Michel Foucault, préface à « Histoire de la folie à l’âge classique ».
Le geste de la création de l’Hôpital Général en 1656 représente pour lui l’une de ces limites, tracée avec l’enfermement des exclus.
Pourrait-on dire qu’avant cette date, entre le XIIème et le XVIIème siècle, le rejet faisant limite était activé tout autrement puisqu’il dépendait de la « fonction Dieu » et d’un paramètre pour nous oublié et dérisoire, la « fonction Diable », ombre de l’Autre.
Dans cette question de la naissance de la médecine psychiatrique, en 1866 le docteur Axenfeld nomme Jean Wier (1515-1588) « le frère ainé de Pinel ». En effet, cet auteur lui permet de poser clairement une étape : « C’est alors que les sorcières apparurent aux yeux de tous pour ce qu’elles étaient réellement : des malades » ( Jean Wier et la sorcellerie, p 79).
Une sacrée chute : Elles passent de la toute-puissance à l’infirmité.
En vertu de quoi, précise-t-il, le médecin prend le pas sur le magistrat. Enfin.
Quinze ans plus tard, de 1882 à 1902, le docteur D.M. Bourneville avec l’appui de J.M. Charcot, fonde la « Bibliothèque diabolique » qui au fil d’une dizaine de textes, va permettre d’asseoir cette position et d’englober mystiques, sorcières et possédées sous une même bannière, celle de l’hystérie.
Mais il se trouve que les travaux actuels des historiens lisent tout autrement cette période. Ils bousculent cette pathologisation opérée par l’Ecole de Charcot. Ils cherchent pourquoi et comment, sur plusieurs siècles, cet imaginaire de la démonologie, dont l’un des axes est le sabbat, a pu se construire, se développer, et tuer. Une autre question, plus trouble encore, se profile : il s’agit de savoir si cela a eu une réalité autre que celle de discours et d’écrits imposant des aveux orientés vers le franchissement de toutes les limites ( y compris celles de la nature), de tous les interdits humains fondamentaux, (meurtres, incestes ), du refus actif de Dieu, et d’ « un érotisme monstrueux et vague, vague jusqu’à la nausée » (Axenfeld, p. 10)
Il y avait du rassurant de mettre tout cela sous le diagnostic d’ « hystérie ».
Seulement il semble que cela ne tienne pas la route.
Quel seraient les effets d’une nouvelle lecture ?
Cécile Imbert
Bibliographie
A. Axenfeld ; « Jean Wier et la sorcellerie » ; Paris, librairie Germer Baillière, 1866.
M. Bergamo ; « L’anatomie de l’âme », Grenoble, Jérôme Million, 1994.
A. Boureau ; « Satan hérétique », histoire de la démonologie (1280-1330), Paris, Odile Jacob, 2004.
Charcot et Richer ; « Les démoniaques dans l’art », suivi de « La foi qui guérit », Paris, éditions Macula.1984.
N. Cohn ; « Démonolâtrie et sorcellerie au Moyen Age, fantasmes et réalités », Paris, Payot, 1982. (A propos du meurtre de l’enfant)
H. Institoris et J. Sprenger, « Le marteau des sorcières » (Malleus Maleficarum), Grenoble, J. Millon, 2005. (Pierre de fondation de la mise en place des accusations et des jugements contre les sorcières)
« Le sabbat des sorciers », XV è –XVIII è siècle » sous la direction de N. Jacques Chaquin et M. Préau, Grenoble, J. Million, 1992.
C. Ginzburg ; « Le sabbat des sorciers », Paris, NRF, Gall. Collection Histoire, 1992.
D. Lett ; « Histoire du genre du XII è au XV è siècle », Paris, A. Colin, 2013.
R. Mandrou ; « Magistrats et sorciers en France au XVII è siècle », Paris, Seuil, 1980.
R. Muchembled ; « Une histoire du Diable », Paris, Seuil, 2002. & autres travaux.
G. Simon ; « Sciences et savoirs au XVII è siècle », Villeneuve d’Ascq, Septentrion, 1996.
J. Wier ; « Histoires, disputes et discours des illusions et impostures des Diables » Paris, Bibliothèque Diabolique, le progrès médical, éditions 1885.
M. Zener, « Inventer l’hérésie », Nice, Centre d’études médiévales, 1998.
F. Mercier et J. Rosé, « Au marges de l’hérésie », Rennes, P.U.R, 2017.
Et bien sûr :
M. Foucault :
« Dits et Ecrits », Paris, éditions Gallimard, NRF, 1994.
T.I : 1968 : « Les déviations religieuses et le savoir médical »
1969 « Médecins, juges et sorciers au XVII è siècle ».
M. Foucault, « Mal dire, dire vrai, fonction de l’aveu en justice » ; cours de Louvain, PUL, 2012.
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3 Juin 2018