Mises en abîme

Loin de pathologiser l’expérience mystique, il s’agira plutôt, ici, de tirer enseignement du rapport à l’Autre qui est gagé et engagé dans cette aventure. Les récits relatant cette traversée parlent souvent de la dissolution du moi. Y aurait-il quelque affinité avec la fin d’une analyse qui est souvent abordée en termes de destitution subjective ? Est-ce du même ordre que la mortification qui accompagne les exercices spirituels et la traversée de l’abîme ? Qu’entendre par là ? «Le» ou «la» mystique sont toujours en quête d’une fusion avec ce Grand Autre, d’une fruition avec Dieu (que ce soit sous forme nuptiale ou dans l’anéantissement vers le rien). À tel point que Romain Rolland a pu qualifier cette sensation de «sentiment océanique». Comment Sigmund Freud a répondu à son «ami» ? Qu’en est-il du rapport à l’Autre dans la psychanalyse et de ce qu’il en reste lorsqu’ont pu être traversé, après une cure, toutes ses tribulations ? Par ailleurs, peut-on recevoir, sans sourciller , le rabattement de la jouissance féminine sur l’expérience extatique de sainte Thérèse d’Avila ? Est-ce que Jacques Lacan n’a pas éludé la dimension masochique qui semble accompagner l’expérience mystique dans la mesure où, dans cette traversée, le corps est voué au rebut et offert comme déchéance, déchet à l’amour de Dieu ? Enfin, si la psychanalyse se démarque de toute médicalisation ou psycho-pathologisation de l’existence, en faisant du symptôme une question de semblant, de jouissance et donc de vérité, de quel style de spiritualité pourrait-elle relever ?