PRÉCAIRE T’ : précaire tu es / précaire tué

SÉMINAIRE
2024-2025

PRÉCAIRE T’
précaire tu es / précaire tué

Sauf à accepter de s’allonger sur le lit de Procuste, et à l’heure où la loi Taquet — loi de Protection de l’Enfance — sonne le glas des possibilités d’accueillir au sein de l’association Visa-Vie (https://www.visa-vie.com/) des jeunes mineur(e)s placé(e)s à l’Aide Sociale à l’Enfance — jeunes en grande délicatesse avec le social et déjà en situation de rupture — il (m’)importe de remettre sur le métier un certain nombre de questions portées tout au long du séminaire[1] depuis 2009.

Les deux années passées nous ont amené(e)s à penser la question de l’impuissance, afin de retrouver une puissance d’agir, en prenant appui notamment sur « l’art de subir » développé par Paolo Virno[2].

« Nos débuts ont l’impuissance pour lieu » écrivait Adam Phillips[3], faisant écho à l’Hilflosigkeit chez Freud (détresse, désarroi, impotence, que l’on peut traduire aussi par impuissance). En quoi cette notion peut-elle nous aider à penser le thème de cette année sur la précarité, mais aussi voire surtout, sur la précarisation des vies ?

La précarité ne sera pas entendue seulement comme un accroissement de la pauvreté et des « vies nues », mais comme un effet du changement radical de l’organisation sociale, de la question du/des Commun(s), des liens et relations sociales, de la place de l’individu et des institutions…

« La précarité (…) instaure une rupture avec les notions et phénomènes plus anciens et mieux connus ». La précarisation est « un processus contemporain de fragilisation tant des individus, des groupes, des institutions et des relations humaines[4] ».

Quels malaises dans la culture, avec quels effets sur les processus de subjectivation, sur le rapport à la parole et au langage ?

Les effets de rupture liée à la précarité renvoient à ce qu’écrivait Roland Léthier dans Arpenter l’Inhabitable :

« La rupture a introduit une cassure dans le rapport au savoir. La rupture fait enseignement dans la mesure où elle introduit de la démesure, de l’insaisissable, de l’aberrant, de l’irrationnel non délirant. Elle fait rupture avec le champ de la parole et du langage tel que Lacan l’avait circonscrit à Rome. La rupture ouvre un champ peu propice à un jardinage avec les outils de la psychanalyse. Cependant ces outils, du fait de leur inutilité, se trouvent utilisables par ce qu’ils ne peuvent atteindre. D’une certaine façon les manifestations de la rupture découvrent des régions inconnues des arpenteurs de l’inconscient. Leur impuissance théorique et pratique les rend innocents, incompétents, désolés et désolants. Ces qualités favorisent (cependant) une proximité avec ces autres innocents que sont les habités de la rupture[5] ».

Nous continuerons donc de tenter de penser et d’arpenter l’inhabitable, à partir des outils « inutiles » de la psychanalyse, sans lâcher non plus notre deuxième fil qu’est la question de l’aliénation sociale.

Ce séminaire prévoit des déplacements au gré des rencontres et opportunités afin d’enrichir les échanges et partager, avec quelques autres, nos réflexions et questionnements.

Notes en bas de page :

[1] Séminaire : terreau, humus qui a donné le jour aux dispositifs d’accompagnements des jeunes mineurs confiés par l’ASE. Le séminaire a continué de nourrir ensuite la pratique à Visa-Vie, dans un va et vient incessant entre les questionnements qui ne manquent pas de surgir de la pratique et les tentatives de penser ladite pratique.
[2] Paolo Virno, De l’Impuissance : la vie à l’époque de sa paralysie frénétique, éd. de l’éclat, Paris, 2022
[3] Adam Phillips, Trois capacités négatives, ed. L’Olivier, Paris, 2009
[4] Laurent Ott, Philosophie de l’impuissance, sortir de la précarité, éd. Chronique Sociale, Paris, 2019, p. 7
[5] Roland Léthier, « Arpenter l’inhabitable », in Quatre textes de Roland Léthier, Saint-Didier-sur-Chalaronne, Cahiers Typo / Atelier Typo, 2022

Dates déjà retenues :

23 novembre 2024 à Nantes, de 14h30 à 17h 30, Salle Flora Tristan, pôle associatif Désiré Colombe, 8 rue Arsène Leloup 44100 Nantes
18 janvier 2025 à Strasbourg, de 9h30 à 12h
8 février 2025 à Paris, de 9h30 à12h
22 mars 2025 à Strasbourg, de 9h30 à 12h
Fin mars 2025 à Córdoba et Buenos Aires (Argentine)
26 avril 2025 à Strasbourg, de 9h30 à 12h
17 mai 2025 à Paris, de 9h30 à 12h
14 juin 2025 à Bionville, de 10h à 16h

Pour lire/écouter les séances passées : https://www.visa-vie.com/seminaire/precaire-t/

Participation financière : 10 euros par séance

Contact : Sonia Weber
0649143344 sw.visavie@sfr.fr

Crédits de l’image : dessin de Loli