Lacan
Ce volume a élu pour corpus de référence l’ensemble de l’œuvre écrite de Jacques Lacan. Indispensable pour tout lecteur de cette œuvre.
La première partie de cet ouvrage collectif recueille, sous forme d’errata, le résultat d’un peignage de la version publiée par les Éditions du Seuil du séminaire de Lacan de 1960-1961. Nombre d’errata ont valeur de mots d’esprit et circulent d’ailleurs comme tels. La deuxième partie présente les actes du colloque tenu à Paris les 15 & 16 juin 1991 : Pour une transcription critique des séminaires de Jacques Lacan.
Y a-t-il, à dignité égale, deux entités dites homme et femme, séparées par le grand Canyon de la différence sexuelle ? Ou faut-il penser cette différence comme un pur relatif, chaque être humain se situant sur un continuum de plus ou moins homme à moins ou plus femme ?
Sigmund Freud a établi de quelle étrange fçon la sexualité détermine l’être humain : sa pulsion n’est plus l’instinct sexuel hétéronormé des psychiatres d’alors. Avec son surprenant énoncé : «Il n’y a pas de rapport sexuel» et les formules de la sexuation qui le soutiennent, Jacques Lacan est intervenu dans cet embrouillamini entre logique et sexes, inventant un nouvel opérateur, un pastout, qui pointe l’incomplétude de la chose sexuelle.
Guy Le Gaufey étudie comment ces formules ne sont lisibles qu’au regard de contraintes formelles propres à l’enseignement de Lacan, avant tout l’invention d’un «objet partiel» sans précédent dans l’histoire de la psychanalyse. Relève de cette même partialité l’armature logique des formules de la sexuation, à savoir une valeur de la proposition particulière explicitement laissée de côté par Aristote et toute la tradition logique classique.
Cette particularité permet de dégager la logique sous-jacente aux vignettes cliniques, brefs récits de cas censés illustrer un fragment théorique jugé par trop abstrait. Le pastout de Lacan fait valoir comment, derrière l’apparente modestie de leur naïveté empirique, ces vignettes en viennent à faire du savoir une référence inquestionnable. L’opérateur pastout réaffirme au contraire la partialité foncière et sans totalité de l’être humain
Comment et pourquoi Jacques Lacan a-t-il conté sept versions différentes du cas de l’homme aux cervelles fraîches, aucune n’étant fidèle au récit d’Ernst Kris ? Pourquoi et pour qui s’est-il enfermé dans son écritoire, de mars à octobre 1966, introduisant des milliers de corrections à plus de cinq cents paragraphes de ses Écrits ? Pourquoi les écrits de Lacan sont-ils plus candides et prudents que les séminaires qui constituent leur point de départ ? Quel motif eut le «Retour à Freud» de faire la sourde oreille à l’endroit de certains livres de Freud ? Comment se fait-il que les théories postmodernes de l’écriture et de la lecture encouragent un abord de paragraphes de Lacan que la majorité de ses commentateurs passent sous silence ? Quelles sont les preuves que le Joyce dont parle Lacan dans son séminaire Le sinthome n’est pas l’écrivain irlandais James Joyce, et quelle est la raison de cette fiction lacanienne ? Quelles sont les trois raisons pour lesquelles la conférence peu amicale «Joyce le symptôme I» devrait devenir une lecture obligée des cours d’introduction à l’œuvre de Lacan ? Voilà, entre autres, quelques unes des énigmes que déplie et discute Jorge Baños Orellana. Il souligne ainsi que les traces sinueuses d’un frayage public ne doivent pas faire négliger que Lacan, s’éloignant à l’occasion des microphones, travaillait dans l’intimité concentrée de son écritoire. D’abord publié en Argentine, El escritorio de Lacan donna lieu à un débat public entre l’auteur et Jean Allouch. Jorge Baños Orellana a souhaité que ce débat figure dans l’édition française de son ouvrage.
Que de qualificatifs l’amour n’a-t-il pas reçus ! On l’a voulu conquérant, platonique, divin, courtois, conjugal, extatique, pur, romantique, fou, soignant, charnel, passionnel, sexuel, etc. Autant de termes, autant de figures de l’amour offertes par l’histoire à une modernité que ce foisonnement désoriente. Discrètement, Jacques Lacan releva ce défi.
On ne sait trop pourquoi, le petit dieu Éros avait investi l’exercice analytique, s’y insérant comme une expérience (amoureuse) dans une expérience (l’analyse). Freud dénomma « transfert » cet événement inouï. L’embarras moderne à l’endroit de l’amour n’était pas pour autant déjoué. Aussi surprendra-t-on ici Lacan, sans cependant résoudre toutes les questions soulevées, tenter de faire « refleurir l’amour ».
En lecteur patient d’une parole désormais vouée à l’écrit, Jean Allouch, avec la prudence et l’attention qu’on lui connaît depuis Marguerite, ou l’Aimée de Lacan et Érotique du deuil au temps de la mort sèche, montre, au plus près des formulations lacaniennes, comment s’invente une nouvelle figure de l’amour.
Tout lecteur des séminaires de Lacan s’est pris plus d’une fois à rêver d’un index qui lui permettrait de trouver dans ces milliers de pages les références à tel auteur ou à tel ouvrage. L’index ici proposé parcourt l’ensemble des séminaires de 1953 à 1980.
Réalisé sous la direction de Guy Le Gaufey par un large collectif de lecteurs membres de l’elp.
Comment Lacan aura-t-il pu – s’il l’a pu – décisivement toucher aux fondements eux-mêmes de la psychanalyse et donc porter atteinte à bon nombre de postulats freudiens sans que, pour autant, la psychanalyse ainsi recomposée ait cessé d’être freudienne ?
trad. en espagnol de Silvio Mattoni, Freud, y despuès Lacan, Buenos Aires, Edelp, 1994
Née en 1920 dans un train entre Poitiers et Angoulême, Janine Loo, peintre et sculpteur, a repris son nom de jeune fille pour signer ces deux BD (réunies en un volume), en mémoire de son père mais aussi parce que la lettre O est sa préférée, lui évoquant un œuf, la forme parfaite. Son père, arrivé de Chine à Paris avant la Première Guerre mondiale, est rapidement devenu l’un des plus grands antiquaires d’art d’Extrême-Orient, créant une galerie à Paris, puis une autre à New York. En 1926, par nostalgie, il fit construire la fameuse Pagode rue de Courcelles à Paris. En 1947, il demande à sa fille d’en prendre la direction. Mon ami le séducteur et Les petits dépressifs ne sont pas le résultat d’un projet réfléchi. Au cours d’une pénible labyrinthite suivie d’une crise de mélancolie profonde, Janine Loo se mit à tracer (dans un état second, pense-t-elle) des dessins sur des bouts de papier épars sur son lit. À l’occasion d’un rangement, retrouvant ces dessins, elle les dispose, par jeu, à plat sur sa table. Puis, suivant un itinéraire « inconscient », les place les uns à la suite des autres. C’est alors que des mots isolés lui sont venus à l’esprit, dont elle va se servir pour faire des petites phrases, bientôt composées en deux histoires : ainsi naquirent les deux bandes dessinées Mon ami le séducteur et Les petits dépressifs. Dans les années cinquante, Jacques Lacan, curieux de l’art d’Extrême-Orient, rendit visite à Janine Loo à la Pagode. Avec leurs mêmes initiales, ils étaient faits pour s’entendre. De cette première rencontre est née une amitié durable. Longtemps après, au cours d’un déjeuner, elle lui demande son avis sur ses BD. Souhaitant d’abord les garder pour les lire à son aise, il les lui rendit quelques jours après, accompagnées d’un petit commentaire amusé.
Textes et dessins (quadrichromie) de Janine Loo. Avec deux lettres inédites de Jacques Lacan.
Un hispanophone le premier affronte explicitement le problème posé par l’hermétisme de Lacan, le « Góngora de la psychanalyse ». Au travers d’anecdotes savoureuses et de réactions cocasses à l’enseignement de Lacan, ce livre présente la description raisonnée des quatre figures majeures qui, selon Baños, caractérisent la transmission lacanienne : une réécriture kitsch produisant un Lacan à portée de tous, un jargon s’attachant à mimer le style de Lacan, une glose s’employant à la résolution des énigmes et une réaction académique néo-classique.
La conjugaison de ces quatre voies parvient-elle à transformer le frayage de Lacan en une « science normale », au sens où l’entend Thomas Kuhn ?