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Psychanalyse / Folie / Psychiatrie : dé-tressées ?

Workshop


Latest date

12 June 2017 - Nantes

Atelier/Forum

Année 2016-2017

All dates


  • 19 September 2016

    10 October 2016

    14 November 2016

    12 December 2016

  • 9 January 2017

    6 February 2017

    6 March 2017

  • 3 April 2017

    15 May 2017

    12 June 2017

Argument


À propos,

“Schreber Président” [1]

Le rapport de la psychanalyse à la folie se trouve lié d’emblée à la psychiatrie par l’étude de Freud, Le Président Schreber. Un cas de paranoïa, publiée dès 1911. Jung offre à Freud Les mémoires d’un névropathe que Daniel Paul Schreber rédige sur la base de notes prises au cours de son internement à l’asile, dans le temps où il recouvre un certain apaisement (entre 1900 et 1902). Dans son texte, Freud interprète « à distance »,  répondant (d’une place d’herméneute ?) à l’appel de Daniel Paul Schreber. Il propose un sens au délire, autorise une sortie des théories de la dégénérescence et ouvre une voie nouvelle pour la psychiatrie et la psychanalyse, en incluant la folie dans le « champ de discursivité »[2] de la psychanalyse. Le singulier transfert de Schreber sur Fleschsig dans la clinique duquel il est d’abord interné, sert d’axe à l’interprétation freudienne autour des liens qu’il suppose de la paranoïa avec une défense contre l’homosexualité. Freud tresse ainsi folie, psychanalyse et psychiatrie en ouvrant une voie à l’écoute du délire, mais en refermant aussitôt le foisonnement schrebérien sous les verrous d’une théorie qui tend, surtout au fur et à mesure des générations de commentateurs, à masquer son objet et à s’y substituer.

Des lieux pour des processus de subjectivation ?

En France, des psychiatres réfugiés à Saint-Alban pendant la seconde guerre mondiale, mettent en acte autour de la folie, dans des conditions asilaires où les patients meurent de faim, des notions liées au marxisme, à la psychanalyse et à la psychiatrie en un mouvement initié par François Tosquelles, nommé par Georges Daumézon, « psychothérapie institutionnelle ». De cet élan historique, relevons seulement deux faits : Tosquelles, réfugié de la guerre d’Espagne, fait imprimer la thèse de Lacan et la fait connaître et, dès 1953, Jean Oury crée la Clinique de La Borde qui devient un lieu expérimental permanent. Le marxisme, autre discursivité, selon Foucault, prend en compte les réalités sociales dans lesquelles s’enracine la ségrégation asilaire. Il inspire la psychiatrie de secteur à venir, puis partiellement l’antipsychiatrie. Le nouage « marxisme, psychanalyse et psychiatrie » se constitue autour de la folie à partir de la psychiatrie, de façons diverses, mais imprime un mode de soin largement dominant dans les lieux de soin de 1960 à presque 2000, au point que Jean Oury écrit : « psychothérapie institutionnelle et psychiatrie sont la même chose ». « Un principe essentiel, sur lequel s’appuie notre praxis, est l’abord multidimensionnel de la psychose. « Multidimensionnel » ne veut pas dire étanchéité entre diverses « dimensions », mais mise en acte d’approches différenciées : le social, le psychologique, le psychanalytique, le biologique. »[3] Les tressages sont donc multiples. Les ratages poussent aux reprises et donc, à des discontinuités, à des répétitions fécondes. Les tissus se recomposent au gré des nouages de l’art des acteurs.

Un certain nombre de conditions légales, politiques, économiques, idéologiques ont largement mis à mal ces zones de travail collectives gagnées depuis des dizaines d’années. Le primat du biologique, dans le cadre général du « biopouvoir », a nommé « maladie » des souffrances en créant de nouveaux syndromes dont l’autisme [4], fait qui révèle les soubassements économiques et idéologiques des théorisations. Est-ce qu’aujourd’hui les champs de la psychanalyse et de la psychiatrie se détressent ? Dé-tressées par la force du DSM ou des neuro-sciences ? Stressées, elles deux, dans l‘anomie sociale galopante? Faut-il vraiment en pâtir ? Le vivre en détresse devant la folie laissée à la sauvagerie sociale ? Ou bien trouver là cause à élargissement, à nouvelles inventions ?

 Lacan : inspirateur de tresse ?

Contrairement à Freud, Lacan aborde la question de la psychose en psychiatre dans sa thèse de médecine, De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité, la « longue monographie» [5] de celle qu’il nomme Aimée A., « observée durant un an et demi environ. »  Les deux disciplines sont donc biographiquement liées pour lui et il ne semble pas que jamais il les oppose. Son parcours, à partir de sa thèse, peut être perçu comme une tentative de forger des outils pour l’objet de la psychanalyse. En particulier, il met à l’épreuve, dès 1953, son ternaire Réel, Imaginaire, Symbolique, jusqu’à ses derniers séminaires.

Quand, dans Le moment de conclure [6], le 9 Mai 1978, il propose une certaine « tresse » comme « représentation » (sic) et si c’est avec cette tresse-là que Jean Allouch remet sur le chantier le devenir d’Aimée en Marguerite Anzieu, on peut penser, qu’à la fin de son parcours, comme le note ce dernier, Lacan tente encore de répondre aux questions laissées en suspens dans sa thèse. On peut aussi bien laisser flotter les derniers mots de ce séminaire qui font écho à nos questions. Ne dit-il pas « tressé borroméennement », équivalence « non tressé » ? Lacan nous laisse-t-il cette tresse qui serait tresse du lien social tel que Jean Oury le note, bien au-delà de la folie ? Et que fait-il quand, à I’instant de conclure, devant son public, il retire sa propre ceinture tressée ? Que ceignait-elle ? Cesse-t-elle alors de ceindre ? De ceindre le corps absent ? De ceindre les corps souffrants ? Ceux, tous, que la folie traverse ? Une ceinture tressée trop serrée – de discipline des corps ? Ouvre-t-il intervalle entre corps et chair ? Là où est l’étoffe ? De quelle « étoffe » [7] est notre psychanalyse, interroge-t-il ? Lacan a tendu cette ceinture au public du séminaire, libre. Par force, il en est resté là. Comment accueillir aujourd’hui les lignes d‘erre de la folie féconde ?

Atelier / Forum

  • 1 – Si l’on souhaite se pencher, une nouvelle fois, sur le texte de Daniel Paul Schreber, c’est sans doute, parce qu’aujourd’hui, aucun auteur d’aucun texte ne peut, de la sorte, être épinglé si fortement d’un diagnostic tel,  même sous forme de discussion. Personne ne peut le déplorer. Or, si le Président Schreber est devenu un paradigme de la psychose bien à ses dépens, (peut-être en a-t-il souffert de son vivant ?- suggère Jean Allouch, après 1903, date de la publication de ses Mémoires), s’il faut des conditions exceptionnelles d’histoire, de qualité de récit et de ses réceptionnaires (Freud d’abord) pour la mise en place d’un paradigme, sa ” déconstruction ” requiert aussi des conditions singulières. N’arrivent-elles pas en ce moment de crise dont nous sommes témoins et acteurs ? La question des diagnostics est aiguë en psychiatrie avec les classifications du DSM. Mais la psychanalyse ne devrait pas être concernée si elle n’avait, depuis des lustres, servi d’appui logique et causal à la psychiatrie, en renforçant son propre rôle descriptif, partageable, sériel des symptômes. Elle a largement aidé à pathologiser la vie sociale, même si une grande part des psychanalystes se sont employés à résister. L’opportunité d’une claire dépathologisation de la psychanalyse n’est-elle pas à l’ordre du jour ?

 

  • 2 – C’est pourquoi, re-visiter les diverses étapes du paradigme Schreber, semble un biais pour aborder, sur un même nom remarquable, les divers abords cliniques et les interroger.

 

  • 3 – Expérimenter la lecture du texte brut, (en français et un peu en allemand). L’oubli actuel trop fréquent de la parole du « fou » au profit de notations de comportement, une fois passé un diagnostic rapide, fait de la relecture du texte original, un enjeu politique. Privilégier la lecture à haute voix laisse espérer des effets de déplacement. Yves Arcaix, comédien, metteur en scène, a accepté d‘accompagner l’expérience qui sera menée dans un second atelier, en lien  avec celui-ci. Atelier Des Voix à la Maison des Syndicats, 1 Place de l’Etat,  Ile de Nantes, à Nantes. Salle B, 2ème étage, 20h45,  12 /09, 3/10, 3/11 et 5/12/2016, 30/01, 27/03, 24/04, 29/05,26/06/2017.

 

  • 4 – L’Atelier/Forum accueillera aussi toutes expériences actuelles qui entrent dans le cadre du débat et seront amenées par les présents.

 

  • 5- Il aura aussi un rôle pour préparer et faire le bilan des conférences qui auront lieu parallèlement.

 

Joëlle Oury animera une rencontre autour de son ouvrage, Daniel H. La modeste contribution d’un pâtissier à l’équilibre terrestre. Paris, Ed. Hermann, 2012. Nantes, Salle de la Médiathèque, Jeudi 3 Novembre 2016, à 20 h. 30.

Il n’y a pas de volonté dans le fait de tresser mais il y faut une plongée dans l’espace. Les intervalles ainsi ménagés sont juste à disposition.

 

[1] Titre heureux de l’ouvrage collectif aux Ed. Fage , voir ci-dessous.

[2] Michel Foucault, Qu’est-ce qu’un auteur ? Revue Littoral 9. 1983. Ed Eres Téléchargeable. Littoral.

[3] Jean Oury, Psychanalyse, psychiatrie et psychothérapie institutionnelles. Vie sociale et traitements. 2007 3 n°95 Ed. Eres.

[4] Marie-Claude Thomas, Genèse de l’autisme, Freud, Bleuler, Kanner, Paris, Ed. Epel, 2014.

[5] Jean Allouch, Marguerite ou l’Aimée de Lacan, p. 18  et 19.

[6] Jacques Lacan, Séminaire. Le moment de conclure, 9 Mai 1978. Gaogoa. Web.

[7] Ibidem.

 

Bibliographie.

Daniel Paul Schreber, Mémoires d‘un névropathe, Editions du Seuil, Coll Points, Paris, 1975.

Sigmund Freud. http://www.unebevue.org/l-unebevue-editeur/freud-zone/84-remarques-psychanalytiques-sur-un-cas-de-paranoia. Edition bilingue.

Le Président Schreber. Un cas de paranoïa, Paris, Payot, coll. « Petite bibliothèque Payot », 2011.

Jacques Lacan, De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité, suivi de Premiers écrits sur la paranoïa, Ed. du Seuil, Paris, 1975.

Jacques Lacan, Séminaire III. Les psychoses, Sur le net : Staferla (staferla.free.fr)

Jacques Lacan, Ecrits, D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose, Ed. Du Seuil, Paris, 1966.

Jean Allouch, Marguerite ou l’Aimée de Lacan, Paris, EPEL, 1991.

Jean Allouch L’ingérence divine II Schreber théologien. Béatitude, volupté, jouissance. Paris, Ed. Epel, 2013.

Jean Allouch L’Autresexe, Paris, Ed. Epel, 2015.

Guy Le Gaufey, Une archéologie de la toute-puissance, Paris,  Epel, 2014.

Maud Mannoni. Le psychiatre, son fou et la psychanalyse, Paris, Éditions du Seuil, 1979 .

Laure Murat, L’homme qui se prenait pour Napoléon : pour une histoire politique de la folie. Paris. Ed. Gallimard, 2011

Revue du littoral N° 40. Témoin Schreber. Epel-edition.com  à télécharger.

Cahier de l’Unebévue, Saint Foucault un miracle ou deux ? Ouvrage collectif sous la direction de Mayette Viltard. L’Unebévue-éditeur.

Cahier de l’Unebevue, Écrits inspirés et langue fondamentale, L’Unebévue-éditeur, 1993. Ouvrage collectif sous la direction de Mayette Viltard.

Un dire atopiqueDaniel Paul Schreber, Collectif elp,  Epel. 2014.

Actifs  Schreber Président , sous la direction de Petitjean, Smith et Thiellement, Fage Editions, 2006.

Bibliothèque ecole-lacanienne.net

L’Unebévue, revue. N°2-L’Elangue, unebevue.org, téléchargeable.

 

  • Voir l’image. Regarder les merveilleux néologismes qu’a inscrits l’artiste:

Five Day Forecast. Lorna Simpson. 1991 Tate Modern. Londres

Ainsi, on lit: Misdescription. Misinformation. Misindentify. Misdiagnose. Misfunction. Mistranscribe. Misremember. Misgauge. Misconstrue. Mistranslate.

FURTHER INFORMATION


Les lundis 19 septembre, 10 octobre, 14 novembre, 12 décembre 2016, 9 janvier, 6 février, 6 mars, 15 mai et 12 juin 2017, à 20 heures 45.

Maison des associations, 42 rue des Hauts-pavés, Salle C, au fond de la cour d’accueil, chemin à droite, à Nantes.

Entrée libre

Contact : ELPsynanalyseNantes@free.fr

Annie Guillon-Lévy / Tél. Nantes, 02 40 47 31 60.

École lacanienne de psychanalyse : elp@ecole-lacanienne.net